Félicitations, vous allez faire économiser quelques euros à votre entreprise en allant déguster votre café à la nouvelle machine. Même si vous n’êtes pas vraiment convaincus par ces nouvelles directives contraignantes, vous êtes bien obligé de vous soumettre au discours de votre directeur, fièrement prononcé lors du dernier meeting, où il annonçait les différentes mesures pour réduire les coûts de l’entreprise. La disposition des anciennes machines en libre-service provoquait d’importantes dépenses, ainsi que des abus de certains employés, qui subtilisaient parfois, jusqu’à plusieurs dosettes du précieux nectar. Alarmé par la comptable, il était donc grand temps pour le directeur de mettre fin à ce scandale et de réaliser quelques coupes budgétaires, en ne laissant qu’une machine commune devant son bureau.
Mais cette grande décision est-elle vraiment gagnante ?
Un coût caché, c’est quoi ?
Un coût caché peut être défini comme un coût qui n’apparait pas dans le système comptable. Ceux-ci peuvent émerger d’un mauvais management, ou d’un dysfonctionnement de l’organisation, mais ils sont souvent attribués à la nature humaine : l’absentéisme, les retards, le turn-over, l’arrêt de travail, ou encore la diminution de la performance ou de la qualité.
Un grand nombre de facteurs soutenant la théorie du passager clandestin d’Olson, qui pose comme problème, l’existence, à l’intérieur d’un groupe, d’une entité qui, seule, pousse l’action collective vers son terme.
Le problème serait donc dû à une poignée d’employés qui, activement désengagés, se servaient gracieusement dans les stocks en café de l’entreprise. Il semblait donc légitime de réduire le nombre de machines, pour que l’unique restante se situe devant le bureau du directeur. Ce qui, selon lui, dissuaderait à coup sur les malfrats.
La raison du désengagement ?
Alors non, vous n’êtes pas enjoué de devoir payer le prix fort, à cause d’un collègue de travail qui avait la main lourde. Vous contenez votre frustration, sans rien dire. Oui mais voilà, on peut aussi en arriver à se demander, si la faute revient seulement à votre collègue, ou plutôt à vos managers et à votre dirigeant ?
La France est sur le podium du désengagement. Elle comptabilise en effet seulement 11% d’employés engagés, 61% de désengagés et enfin 28 % de désengagés actifs. Ceux-ci ne trouvent un palliatif à leur détresse qu’en attirant vers le bas le reste des salariés. Ce désengagement actif trouve pourtant étrangement sa genèse là où la comptabilité y voit une économie. La diminution de l’implication de l’individu vis-à-vis de son entreprise se matérialise bien sûr, par l’absence de sens à son action, par l’image que le monde du travail lui renvoie de lui-même, mais aussi par la déresponsabilisation, l’abus des contrôles, et les reporting toujours plus fréquents. Frustré du manque complet d’autonomie décisionnelle, il se meut, petit à petit dans une contestation silencieuse. Conséquence : des comportements contre-productifs, passant d’une attitude pessimiste au « vol des dosettes sacrées », jusqu’à finir par peser lourd sur les performances et sur les finances de l’entreprise.
Face au cercle vicieux du désengagement, la confiance comme solution.
Pour résumer, le directeur réagit donc à des pertes infimes, afin d’affirmer son autorité face au personnel activement désengagé. Ces réformes défavorisent le climat social, et poussent d’autres salariés au désengagement, ce qui finira par générer de nouveaux contrôles, et une infantilisation massive, bridant toute forme d’innovation et de productivité.
Ces mesures liberticides forment un salaire qui n’est jamais pris en compte. Celui de Big Brother en entreprise. En allant chercher votre café à l’unique machine, la comptabilité n’a certainement pas pris en compte l’affluence plus importante. Le temps d’y aller et de récupérer votre café vous aura fait perdre au total, 30 minutes de votre journée de travail. En comparant le prix d’une dosette au taux horaire d’un collaborateur, le calcul n’est au final, pas rentable du tout. Et tout ceci sans compter le sentiment de frustration que ces dispositions ont sur les salariés. Cet exemple n‘est pourtant pas isolé, et se retrouve dans beaucoup de situations connexes, qui ne cessent de faire grimper l’addition et par la même occasion de remplir les poches de Big Brother.
Il faut donc apporter une solution à ce processus sans fin, et redonner de l’envie au travail en entreprise. Les études de L’observatoire de l’engagement ont mis en évidence le fait que lorsque qu’un collaborateur est dans un environnement épanouissant, où il se sent accepté et intégré par ses pairs, qu’il comprend la stratégie et adhère à la vision de l’entreprise, celle-ci obtient des résultats spectaculaires en termes de relation client, d’innovation, d’image et de productivité.
Enfin, selon le rendement financier fourni par le Human Capital Institute, pour chaque euro de salaire, le collaborateur activement engagé apporte une valeur ajoutée de 1,20 euro contre 60 centimes pour l’activement désengagé.
Voilà, vous savez maintenant quels pivots mettre en place pour retrouver le sourire et la motivation. N’hésitez pas non plus à laisser sur le bureau de votre manager, cette petite citation :
« La confiance rapporte plus que le contrôle. Les éventuels abus résultant de l’absence de contrôle ne coûtent rien en regard du coût des contrôles. » Jean-François Zobrist (ex DG de Favi – fonderie de cuivre)