Comment faire de vos middle managers des leaders ?
Près de la moitié des démissions dans le monde sont causés par la mauvaise relation qu’on a avec son manager direct ! Cette étude Gallup corrobore directement les intuitions qu’on pourrait avoir : la majorité des malheurs relatés en entreprise tourne autour des comportements de son chef. Et pour cause… Trouver des bons middle managers – capable à la fois de motiver leur équipe, de faire grandir leurs collaborateurs, et d’anticiper les changements de l’entreprise tout en prenant des initiatives – semble parfois mission impossible.
Pourtant, vous ne pouvez pas vous passer d’eux. Toutes les transformations de votre entreprise commencent par le middle management. Ils sont la courroie de transmission de votre vision de dirigeant, et les premiers relais de votre culture d’entreprise. Sans un engagement total de leur part, point d’agilité, d’innovation, ou même de plaisir au travail pour vos collaborateurs !
Soyons clairs : investir sur vos middle managers est LE meilleur moyen pour exécuter rapidement votre stratégie, tout en attirant et retenant les meilleurs talents.
Pourquoi vos middle managers sont rarement des leaders ?
Que ce soit en startup ou dans les grands groupes, quel est le motif le plus courant pour être nommé manager ? Je vous le donne en mille : l’ancienneté. Parce qu’on ne peut ou ne souhaite pas augmenter quelqu’un pour son bon travail, on se propose de lui donner de l’avancement. Et on néglige en général sa formation et son accompagnement. Comme si manager n’était pas un métier, qu’il n’y avait pas de compétences associées… Gérer l’humain, ce n’est pas inné.
Que se passe-t-il dans ce cas-là ? L’expert devient manager. Il abandonne un boulot dans lequel il excellait pour un autre qu’il ne maitrise pas. L’ancien bon élément passe de la réussite à l’échec, car il n’est pas à la hauteur de son nouveau poste, conformément au principe de Peter. De respecté par tous grâce à ses compétences, il devient jalousé pour son statut. On se confiait à lui, maintenant on se méfie. La solitude s’empare peu à peu de ses journées, coincées entre revendications de son équipe, décisions difficiles à prendre et pressions hiérarchiques.
Trois pistes se proposent alors à celui qui veut bien faire, mais ne sait plus comment y arriver :
- Il peut devenir un petit chef, de ceux qui passent leurs frustrations sur leurs subordonnés, en les harcelant d’ordres absolus et parfois contradictoires.
- Il peut rester leur ami, en prenant leur défense contre la Direction, et en se désolidarisant de la vision de ses dirigeants.
- Il peut s’écraser totalement, ne rien décider, et laisser son équipe dériver, pour éviter de prendre le moindre risque de froisser qui que ce soit.
Ces trois scénarios catastrophes sont, au sens propre du terme, des impostures. Car en management, il est primordial d’apprendre à trouver la bonne posture.
Et justement, ces trois postures refuges dans lesquelles les managers débutants s’enferment bien malgré eux, ce sont des outils que le manager doit savoir manier, pour exercer au mieux sa profession. La posture haute, dont le petit chef use et abuse, c’est celle du mentor qui explique, conseille, et parfois ordonne avec douceur et fermeté. La posture pair-à-pair, que les managers qui veulent rester ami affectionnent, c’est celle du confrère qui co-construit et réfléchit avec vous. Et la posture basse, dans laquelle ceux qui ne veulent pas prendre de décision se complaisent, c’est celle du coach, qui oriente sans intention, et vous donne votre chance.
Un bon manager ne se cantonne pas aux postures qu’il trouverait confortables, selon son interlocuteur. Il s’adapte pour aider ses collaborateurs à s’engager dans leur job, à grandir en renforçant leurs compétences, et à s’épanouir au quotidien. Plus qu’un « gestionnaire » – cette triste traduction de manager – il doit apprendre à être un leader qui met en mouvement.
Attention cependant, l’alternance de ces postures avec une seule et même personne peut être déstabilisant pour elle. Alors en tant que manager, n’hésitez pas à signifier votre changement de posture, et à expliquer pourquoi à un moment vous exprimez un conseil, un avis, ou un questionnement.
Ceci étant dit, comment peut-on aider les middle managers à devenir des leaders ?
Donnez à vos managers les moyens de progresser
Le management, c’est comme le sexe, ça ne s’apprend pas à l’école. Quand on parle de posture, de savoir-être, de comportement, on sent tout de suite que la théorie ne sera pas d’une grande aide. Un peu comme dans un art martial, ce qui compte vraiment, c’est la pratique. Alors, déjà, donnez du temps à vos managers, et pas seulement pour produire les reportings à rallonge que vous leur demandez… Il leur faut essayer tous les jours de faire grandir leurs équipes. Dès qu’on se sent incompétent, on se dit toujours qu’une bonne formation est la solution à tous nos maux. Mais le format classique – ou pire, en ligne – avec un professeur qui explique comment devenir un bon manager ne fonctionnera pas ! Cherchez plutôt des cours où la mise en situation est reine, et les interactions constantes. On manage des humains, alors il faut apprendre au travers d’une relation et pas d’un PowerPoint. On vous conseillera par exemple nos amis de Trixir, qui créent des jeux très sérieux pour faire progresser les managers.
En vérité, votre plus grande source de progression, vous la trouverez en interne. Qui de meilleur qu’un manager de chez vous pour aider un autre manager de chez vous ? Ça peut paraitre évident, mais rares sont les entreprises à avoir mis en place de réels programmes de développement pour managers. Commencez par un programme de tutorat, où chaque nouveau middle manager aurait un collègue expérimenté pour l’accompagner (on pourra imaginer des séances hebdomadaires de 45 minutes). Organisez des sessions de supervisions et d’entrainement le midi, entre managers. Incitez-les à s’investir, à partager leurs galères ou leurs réussites, par exemple en leur offrant le déjeuner. Toutes ces idées vous paraissent complexes ou coûteuses ? Sur le modèle de Never Eat Alone, instaurez des déjeuners croisés aléatoires entre middle managers, pour leur donner l’occasion d’échanger.
Il y a encore une chose fondamentale pour la progression des managers, c’est le feedback de leur équipe. Pas si facile de demander à un subordonné ce qu’il pense de vous ; pas si évident de dire à son chef tous ses griefs. Cependant, il est indispensable de mettre en place un processus d’évaluation 360, sans quoi les mêmes erreurs se répèteront, encore et encore.
Pour un manager, prendre du recul indispensable à sa progression. Conseils éclairés, avis pertinents et critiques constructives forment un terreau vital.
Une fois que vos middle managers ont les moyens de progresser, il faut leur donner les moyens de travailler. Aux bons managers, les bons outils. Questionnaire de recrutement, programme d’intégration des nouveaux, trame d’évaluation et de suivi de la performance, marche à suivre pour les départs… Tous ces supports sont en général rédigés par les RH, et mis à disposition du middle management sans réelle formation, finissant alors par les désespérer au lieu de les soulager.
Si vous voulez que vos managers deviennent meilleurs, vous devriez les impliquer dans la fabrication de leurs outils. Pour qu’ils se les approprient, mais aussi qu’ils aient une occasion de réfléchir à leur métier, et la culture de leur entreprise. Et puis, à la fin de la journée, c’est eux qui s’en serviront, alors ne pas leur demander de participer, c’est à coup sûr produire des documents peu adaptés à leur contexte.
Structurez l’information pour les rendre autonomes
Les armer pour affronter leur quotidien est une chose. Mais sans une compréhension fine de l’entreprise (son histoire, ses valeurs) et de sa vision (sa stratégie, sa tactique, ses objectifs), autant les abandonner en pleine mer, et sans boussole !
En général, la stratégie est réservée aux stratèges – fondateurs, dirigeants, investisseurs et autres consultants spécialisés. De leur travail nait une vision certainement pertinente, mais très rarement exprimée avec les mots de leurs équipes. Les plans à trois ans se suivent et se ressemblent, et les managers se lassent de toujours répéter la même chose.
Pas étonnant que les middle managers freinent toute transformation, quand ils ne croient pas intimement aux raisons qui les engendrent. Il vous suffirait de les impliquer dans le processus stratégique pour voir se lever une armée de managers promoteurs des changements nécessaires pour l’entreprise ! Votre première responsabilité en tant que dirigeants, c’est de transmettre une vision claire, structurée, détaillée, qui parle à toute votre entreprise.
Si l’orientation est acquise, alors le middle manager aura besoin d’y voir clair sur l’implication de son équipe, tout au long du chemin qui mène au succès. Vous aurez donc besoin d’un système de management par objectifs, qui décrit clairement quelles sont choses à construire, et quels sont les chiffres mesurant la performance de chaque équipe. Attention au choix de ces indicateurs ! Trouvez-en qui obligent les équipes à collaborer, en rendant la réussite collective.
Quand un middle manager sait où on l’attend, il ne reste plus qu’à le laisser faire. Accordez-lui le droit à l’erreur, car c’est ainsi qu’il trouvera de nouvelles idées pour atteindre ses objectifs, voire les dépasser. Vous êtes clair sur le résultat ? Alors c’est à lui d’identifier et de mettre en œuvre les moyens qu’il juge bon. Pour qu’il soit plus qu’un exécutant, il va falloir lui faire confiance.
J’entends d’ici les cris d’orfraie. Vous avez peur que, livrés à eux-mêmes, vos middle managers mettent à mal l’image de l’entreprise, avec vos clients ou avec vos employés ? Si vous n’avez pas de valeurs formalisées et incarnées, c’est bien normal. Au bout du compte, c’est elles qui servent de garde-fou aux comportements, tout en vous aidant à définir ce qui est un bon manager chez vous. Vos middle managers eux-mêmes devront apprendre à s’inspirer de vos valeurs pour trouver des réponses aux questions épineuses (et hautement humaines) qui se posent à eux tous les jours. À vous de les formaliser et de les former à les utiliser.
En conclusion, voilà la liste de tout ce que vous pouvez faire pour aider vos middle managers à devenir des leaders. Et n’oubliez pas : le parcours du manager doit être un tout cohérent plutôt qu’une suite de patchs correctifs. Prenez le temps avec eux de comprendre leurs besoins et de les impliquer.